Noël dans le monde
A Tahiti
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Noël blanc à Tahiti
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C'est le soir des vacances de Noël. A Mooréa, dans le district d'Afaréaitu, Narii, un petit garçon de six ans, rentre à la maison après une longue journée de classe. Tout en marchant, il pense à la fête de Noël. Depuis huit jours, on ne parle que de cela à l'école. Dans la classe, la maîtresse et les grands élèves ont dressé un beau sapin qu'on a chargé de guirlandes, de boules multicolores et d'ampoules et, toute la semaine, on a chanté des chants de Noël. Quant aux camarades, ils ne parlent que du réveillon et surtout des cadeaux qu'ils espèrent recevoir.
Narii n'a jamais eu de cadeau à Noël. Ses parents ne sont pas bien riches. C'est peut-être pour cela que le Père Noël ne lui a jamais rien apporté. Narii se pose toutes sortes de questions à ce sujet. A force de réfléchir, il finit par trouver une réponse. Dans le livre de lecture qu'il a à l'école, le Père Noël visite toujours les maisons en descendant par la cheminée, dépose les jouets dans les sabots des enfants et tout cela se passe en hiver alors que la campagne environnante est couverte de neige.
C'est bien cela. Jamais le Père Noël ne viendra chez Narii puisqu'on est en Polynésie et qu'en Polynésie, il n'y a jamais de neige, que les farés n'ont pas de cheminées et que lui, Narii n'aura jamais de sabots puisqu'il est trop pauvre pour avoir seulement une paire de savates. C'est vraiment trop injuste... Narii s'assoit au bord du chemin et se met à pleurer.
Il y a bien une heure que Narii pleure au bord du chemin lorsqu'un homme vient à passer. C'est un vieux sculpteur marquisien. "Que t'arrive-t-il petit garçon, demande le brave homme, pourquoi pleures-tu si fort ?" Narii explique les raisons de son chagrin au vieil homme. "Voilà qui n'est pas bien grave et qui ne mérite pas toutes ces larmes. Je pense que je peux arranger tes affaires. Va donc me chercher un gros morceau de purau et apporte-le à mon atelier."
Narii, rempli d'espoir, a tôt fait de trouver le morceau de purau. Il l'apporte au sculpteur qui, en quelques heures, taille dedans une paire de magnifiques sabots ornés de motifs marquisiens.
Narii chausse les sabots.
- Comme ils sont beaux, comme ils sont légers. Une fois dans la cheminée... mais voilà, fait Narii en perdant son sourire, c'est que je n'ai pas de cheminée...
- Mais gros nigaud... c'est bien simple... la nuit de Noël, tu n'auras qu'à aller dormir dans le four à coprah. Là, tu pourras déposer tes sabots dans la cheminée et ce sera bien le diable si le Père Noël ne passe pas par là.
- Oui, bien sûr... mais la neige ?...
- Ne t'inquiète pas, petit garçon... pour la neige, nous trouverons bien quelque chose.
Narii, tout heureux, embrasse le vieil homme et, ses sabots sous le bras, (car il ne veut pas les abîmer) il regagne sa pauvre demeure.
La nuit de Noël, Narii se rend au four à coprah, ses précieux sabots à la main. Il les dépose dans la cheminée et se couche sur le péué qu'il a apporté. Il reste très longtemps éveillé car l'endroit est désert et le pauvre petit tremble à chaque bruit. Enfin il parvient à s'endormir.
Dans son sommeil, Narii entend un léger bruit. Il voit une forme accroupie qui s'affaire près de la cheminée. Quelqu'un lui parle : "Ne crains rien, petit garçon... Je suis le Père Noël. Je n'ai pas voulu que tu sois encore oublié cette année... Allons, au revoir et Joyeux Noël !" "Comme c'est drôle, se dit Narii, on dirait la voix du vieux Marquisien."
Le lendemain, quand il se réveille, il croit avoir rêvé... mais non, il y a là, bien rangés devant la cheminée : une bicyclette, un tambour, une petite auto mécanique et toutes sortes de friandises. Et miracle ! tout autour du four à coprah, la neige !... la neige sur le sol, la neige sur la haie, la neige sur le toit des farés, la neige partout ! La neige ? Non mais des milliers de tiaré que le vent, complice, a cueilli et répandu alentour comme de blancs flocons de Noël.
Les fleurs sont à l’origine de nombreuses légendes polynésiennes. Le tiare maohi appelé aujourd’hui Tiare Tahiti pour le différencier du mot « tiare » qui signifie « fleur » en général aurait été créé par le Dieu Atea avec l’aide de Tane, Dieu de la beauté. A l’époque des ancêtres polynésiens, seuls les rois et les princes pouvaient cueillir cette fleur sacrée. Par la suite, le tiare était uniquement utilisé en symbole d’amour. Lors des mariages polynésiens, la maison et le lit des jeunes mariés étaient tapissés de tiare pendant 30 jours. Le parfum des tiare permettait au jeune couple d’atteindre le secret de plénitude du Dieu Atea. De nos jours, le tiare Tahiti est utilisé par les jeunes Tahitiens dans leurs jeux amoureux. Un tiare Tahiti à l’oreille gauche signifie que le cœur est pris mais, à droite, il reste à prendre.
Voilà l'histoire du Noël de Narii... Mais, me direz-vous, amis de Mooréa, il n'y a jamais eu de sculpteur marquisien à Afaréaitu... alors ?