Tous ceux qui entrevoyaient un accord sur les salaires ont vite déchanté ce vendredi matin à la préfecture. De retour à la table, le Collectif a signifié son refus des formulations émises la veille par le patronat. Jeudi, pendant la nuit, celui-ci a en effet proposé une prime allant de 15 à 100 euros. Une prime à laquelle viendraient s'ajouter le RSTA (revenu de solidarité temporaire active)
de 100 euros et la prime spéciale de 17 euros pendant un an versés par l'Etat. Ainsi que les contributions du Conseil Régional : 20 euros et du Conseil Général : 10 euros. Soit au total une prime variant de 162 euros à 247 euros nets, en fonction du secteur d'activité et de la taille de l'entreprise. Un montant qui se rapproche de la revendication du Collectif d'une hausse de 250 euros sur les bas salaires.
Ce bonus serait en effet applicable aux salariés du secteur privé touchant entre 1 et 1,4 SMIC. Autrement dit, entre 1320 et 1849 euros brut.

La médiation des élus

Seulement après examen détaillé de cette proposition, le Collectif est revenu avec une contre-proposition. Les membres de la délégation ont réclamé une élévation de la participation patronale. Celle-ci devrait varier de 50 à 120 euros. En outre, ils veulent que la prime soit applicable sur les salaires allant jusqu'à 1,6 SMIC (2113 euros brut).
En milieu de journée, les patrons répondaient qu'ils étaient dans l'incapacité de donner satisfaction à cette logique de surenchère.
A l'occasion d'une longue suspension, les élus ont reçu successivement membres du Collectif et patrons afin de jouer la médiation. Les discussions ont duré toute l'après-midi. Et en fin de journée, il était impossible de savoir si l'entreprise avait été payante.

 

Après la folle nuit de violences de mercredi, rendez-vous au tribunal. Les deux salles spéciales réservées aux comparutions immédiates sont placées sous étroite surveillance policière. Quasiment tous les prévenus demandent un délai pour préparer leur défense, comme le permet la loi. Les magistrats statuent donc uniquement sur la question de la détention.
David, chef cuisinier d'une trentaine d'années, est en mauvaise posture. Dans la nuit de mercredi, il a été surpris dans l'enceinte de la clinique Sainte-Marie avec un sac à dos contenant une grenade et un couteau de chasse. Deux « armes de guerre » héritées, selon lui, du service militaire. Le vice-procureur demande un mandat de dépôt à son encontre. À son domicile, les gendarmes ont découvert deux enceintes provenant du vol au magasin Guy Vieules, la veille de son arrestation.
Condamné une seule fois en 2003 pour recel de vol, David demande la clémence par rapport à sa fille de 2 ans. Presqu'en pleurs, il dit « n'avoir voulu blesser personne ». Les juges décident de l'incarcérer jusqu'à son procès en mars.
Un jeune Schoelcherois se présente ensuite à la barre. Il a volé une « playstation » au magasin informatique Difintel (150 000 euros de préjudice total, selon le gérant). Le parquet ironise sur le vol d'un « produit de première nécessité » et demande un contrôle judiciaire. Même requête à l'encontre d'un militaire de Basse Gondeau, poursuivi pour le vol d'un paquet de cigarette et autres broutilles. Face à ce lycéen de 18 ans au casier vierge, le vice-procureur déplore un « phénomène d'opportunisme tout à fait détestable » : « il serait peut-être bon que les cours reprennent et qu'il occupe ses jours et ses nuits de façon plus saine ».

Interdiction de se rendre à Fort-de-France

Arrive un couple foyalais pris la main dans le sac à Carrefour Dillon (préjudice total évalué : 240 000) alors qu'il s'approvisionnait en électroménager et multimedia. Elle, secrétaire de la caisse des écoles, lui, concierge dans une école. Tous deux inconnus de la justice. Le ministère public fustige leur comportement. « Je ne comprends que des gens bien insérés, censés être un exemple pour la jeunesse, s'adonnent au pillage, non pas pour survivre, mais pour des produits à forte valeur ajoutée ». Me Ducommun, leur avocate, s'étonne de trouver autant de casiers judiciaires vierges. « Les circonstances exceptionnelles font ressortir le meilleur chez l'être humain mais aussi les instincts les plus vils. Heureusement, la justice est rendue sereinement de manière classique ».
Un sapeur-pompier et un brancardier faisaient aussi partie des 39 suspects amenés à être jugés hier suite aux pillages de Cyber H (700 000 euros de préjudice), d'Intersport, de But, etc... Jeudi, un agent territorial a été condamné à six mois de prison avec sursis pour sa participation aux événements de la première nuit.
Au final hier, presque tous les suspects ont été placés sous contrôle judiciaire avec parfois obligation de pointer à la gendarmerie ou au commissariat. La justice leur interdit également de se rendre à Fort-de-France entre 19 heures et 6 heures du matin, d'ici leur procès en mars ou avril.
Compte-Rendu par R.L.

 

Particulièrement redoutée, la nuit de jeudi à vendredi a finalement été beaucoup plus calme que les deux précédentes. Les pompiers sont intervenus 26 fois, essentiellement pour éteindre des feux de poubelles.
"80 % des sorties ont eu lieu dans le bourg du Lamentin, indique le Codis (centre opérationnel départemental d'incendie et de secours). À Fort-de-France, on compte quatre interventions dont une pour feu de véhicule. Sinon, Ducos, le Vert-Pré, Rivière Salée et le Saint-Esprit ont également été touchées." Et contrairement aux autres nuits, les sapeurs n'ont pas été visés par des jets de pierres ou de bouteilles lorsqu'ils arrivaient sur les lieux.
En zone gendarmerie, même constat d'apaisement dans le Centre. Quelques effractions et vols dans les commerces ont toutefois été constatés dans la commune de Schoelcher. Deux supérettes de proximité ont été la cible d'attaques, entre minuit et deux heures du matin : les pilleurs auraient essentiellement dérobé des bouteilles d'alcool et quelques denrées alimentaires.
Saint-Joseph et Morne Rouge comptent également quelques dégâts : feux de poubelles, dégradation de cabine téléphonique et incendie d'épaves automobiles.