Ainsi toujours poussés vers d’autres grignotages,
Dans cette gourmandise, emportés sans retour,
Ne pourrons nous jamais nous soustraire au pesage,
A son jugement sourd ?
O gras ! je ne veux plus t’avoir dans mes repas,
Car un temps ma ceinture fut prête à éclater,
Regarde, j’ai vaincu le piège du surpoids,
Je peux m’en rappeler :
Je boulottais ainsi dans une joie profonde,
Ainsi je m’empiffrais abruti de télé,
Ainsi je me gavais du spectacle des ondes
Et de gâteaux salées.
Un soir, t’en souvient-il, je mangeais en silence,
On entendait au loin que murmures et pas,
Et le bruit de ma gorge avalant en cadence
Des goulées de soda.
Car d’un coup la télé avait rendu son âme,
Et le grand fleuve hertzien ne trouvait plus d’écho,
L’amour propre fut vif, profitant de ce drame
Pour déclamer tout haut :
« Ô gras ! et vous petits biscuits
Ne me tentez donc plus :
Laissez-moi savourer des portions amoindries
Pour que je n’enfle plus.
« Assez de bourrelets maintenant me décorent
Ce ventre trop repu,
J’aimerais retrouver la beauté de mon corps
Et non être pansu.
« Dois-je me plaindre en vain ? Non, car par des efforts
Les kilos pourraient fuir.
Je dis à l’appétit : sois plus doux et mon corps
Viendra à s’embellir.
« Maigris donc ! Maigris donc ! Et regarde ta panse,
Tu seras motivé !
Voilà ce que je dis, voilà ce que je pense
Pour ne plus rechuter. »
Mais vraiment se peut-il que ce moment d’ivresse
Où toute ma raison concoure à mon bonheur
Ne parte loin de moi, ne restant que promesse
Et rêve sans valeur ?
Et quoi ! si je le veux , je n’aurais de défaite
Quoi ! mon estomac crie ! Quoi ! ma bouche se plaint !
Ce gras que j’ai stocké, ce gras que je rejette
Ne sera plus le mien.
Gâteaux, petits bonbons, soda et sucreries,
Que faisiez-vous de moi quand je vous dévorais ?
Parlez : me rendrez-vous ce que vous m’avez pris :
La beauté de mes traits ?
Ô coeur et toi raison, désir et volonté,
Vous que le temps renforce ou qu’il peut amollir,
Gardez de cette nuit, pour le réaliser,
Au moins ce souvenir.
Qu’il devienne du sport, qu’il devienne régime,
Mon corps sera ainsi que je l’ai décidé,
Je pourrai me sculpter la silhouette fine
Dont j’ai toujours rêvé.
Qu’il soit dans mon esprit maintenant apaisé,
Dans mes yeux libérés de la télévision,
Dans la joie retrouvée d’avoir su ranimer
Le feu de l’ambition.
Que l’éclat de mes yeux, mes lèvres en sourire,
Que le parfum léger dont mon corps est paré,
Que ce que les gens voient, entendent ou respirent,
Tout dise : il a changé.