(Extrait : histoire d'un appelé durant la guerre d'Algérie) Lors d'une autre expédition, je suis chargé de l'intendance étant lieutenant. Aujourd'hui, je vais chercher de la viande - c'est jour gras - avec un appelé nouvellement arrivé, nous nous dirigeons vers le boucher arabe. "Bonjour mon lieutenant !" me dit le boucher. Nous nous connaissons. "Bonjour, Rachid, on voudrait de la viande pas chère comme d'habitude, enfin, vous savez..."Je prends le paquet de viande, et pour nous quitter, je dis les politesses d'usage. Mon appelé qui s'était tenu coi jusqu'ici, lance, par effet de bravoure, de hardiesse, ou d'inconséquence un malheureux : "Et bonjour à votre femme !" Le sang monte au visage du boucher, la main sanguine saisit un couteau maculé de sang. Il hure les yeux injectés de sang : "Tu l'as connais donc ma femme ?" Je m'interpose, essayant de sauver mon téméraire prosateur "Mais, non, mais non, il disais ça comme ça, il ne la connait pas ta femme, c'est une formule de politesse que l'on dit chez nous !" J'empoigne mon appelé, et nous nous sauvons comme deux lâches, la viande sanglante dans les mains, l'arabe éructant toujours après mon novice, et brandissant son couteau ensanglanté....