Mercredi 30 juin : humble, pigeon, foule, tragédie, croire.

Un humble pigeon avait peur de la foule et c'est ainsi que naquit en lui le désir de voyager. Il partit pour fuir la foule, vous dis-je, il s'enrola donc dans les légionnaires volants. Mais la guerre éclata et notre pigeon fut envoyé sur le front pour transmettre les messages du quartier général vers les premières lignes. Bien que très hardi et mâlin pour trouver les chemins, une salve de fusil mitrailleur le blessa et demi-boîteux il fut envoyé dans un sanatorium pour volatiles car le gaz moutarde avait atteind ses poumons. Le ministre des Armées se déplaça lui-même avec son aréopage de sous-secrétaires d'Etat et agrafa la médaille de Combattant sur le thorax de notre volatile qui fiérement la garda toute sa vie.

Durant sa convalescence, notre pigeon admira les mains expertes d'une infirmière tout vêtue de blanc. Le souffle du pigeon était lourd, il claudiquait de la patte mais comme invalide de guerre il se rétablissait rapidement. L'infirmière pansait ses blessures avec soin et l'attention qu'elle lui vouait se transforma en affection puis bientôt en amour.

Croire qui peut croir en l'amour ?

Donc notre infimière s'enticha de notre pigeon. Leur passion fut grande et partagée. Le pigeon ne choisit pas d'autre profession après l'Armistie, il rejoignit les pigeons légionnaires à l'Etat major et coula conjointement un amour profond et immuable pour son infirmière. Celle-ci le promenait sur son épaule les dimanches et dans le creux de ses mains délicates plus volontiers. Leur humble vie commune leur suffisait. Vivre à deux, l'un pour l'autre, les yeux dans les yeux, la griffe sur la main, se réchauffant de leur mutuelle haleine, bec contre bouche. Et infinie fut leur vie ensemble !

Le tragédie dans la vie, vois-tu, c'est la solitude !