Mais pourquoi, chevalier, dites vous que Esculape est le dieu qui préside à l'immortalité des âmes ?

Je dis qu'Esculape est le dieu qui préside à l'immortalité des âmes, car il ressuscita Glaucos dans l'Iliade ; et aussi car il est le dieu de la médecine et soigne en cela le corps et l'âme et l'âme est immortelle chez Platon ; ensuite Socrate use d'ironie finale dans le Phédon lorsqu'il en appelle à Esculape, le dieu des âmes immortelles, c'est un clin d'oeil en forme d'espièglerie, c'est après des libations un hymne à Bacchus. Socrate aime à s'amuser, c'est un comique dans son genre. De plus, il ne s'agit pas de trouver Socrate courageux, il l'est comme il l'a déjà prouvé à la guerre. Non, Socrate meurt confiant, serein car il sait son âme immortelle. Il fait l'expérience de la mort de son corps en philosophe. Et comme il est dit dans le Premier Alcibiade ''à commencer par le corps et à finir par l'âme'', c'est donc à la référence à l'âme qu'il fallait chercher, elle est représentée dans l'évocation d'Esculape ; le corps puis l'âme est une forme de rhétorique propre à Socrate. La mort du corps pour la vie de l'âme. Ensuite Socrate fait sacrifer un coq pour la forme car il a bien la certitude de l'immortalité de l'âme et des dieux omniscients, il meurt pour lui par la volonté divine car il se sait aimé des dieux par essence et non par accident – le coq - Lui habituellement ne fait pas de sacrifice, il prie les dieux. Socrate fut probablement réellement un médecin de profession, il accouche les âmes, son dieu est Esculape qui veut dire ''homme bon'', sage, vertueux – encore un jeu de mot – Voyez comme cela est drôle et comme Socrate s'est moqué du temps et du genre humain. Maintenant je comprends que l'on honore les morts, ils ont beaucoup à nous apprendre. Je veux à présent écouter leurs esprits.

Ne croyez-vous pas que tout cela n'est pas un sophisme ?'' me demanda d'Argenson en me plaisantant. Voilà un bougre d'homme !  »