Nord, Sud. Eleveurs, agriculteurs et toujours des conflits  …

   Poussés vers le sud dans les vingt dernières années de sécheresse qui ont détruit les herbages du nord, les éleveurs nomades bororo et les éleveurs transhumants Peuls et Arabes continuent à migrer, de manière saisonnière ou permanente, vers la zone des champs de pétrole et de l’oléoduc pour profiter des riches pâturages nourris par les rivières.

     Cette population humaine et animale qui s’accroît considérablement induit une pression insupportable sur le peu de ressources naturelles qui restent exploitables. Ce petit espace fertile que les éleveurs et agriculteurs sont désormais obligés de partager, est également occupé par le projet pétrolier, ce qui débouche inéluctablement sur des conflits malheureusement entretenus par la situation politico-militaire du pays.

     Qualifiés « mamelles de l’économie tchadienne » l’agriculture et l’élevage peuvent s’intégrer harmonieusement du fait de leur complémentarité. Mais la pression sur l’espace et la gestion de celle-ci oppose les différentes communautés. Eleveurs et agriculteurs n’entretiennent pas de relations de complémentarité et  les affrontements se multiplient en dévastations, piétinement des champs, vol de bétail.

     Le Tchad est un pays fortement marqué par un clivage nord/sud, non seulement au plan géographique mais aussi humain. Le nord  est composé d’une population nomades :  les Gorane, les Toubou dans la zone saharienne, et d’une population au mode de vie plus variée dans la zone sahélienne éleveurs, agriculteurs, nomades et sédentaires. C’est un ensemble fortement islamisé. Issus d’anciens sultanats et empires, les peuples du nord ont régenté le territoire tchadien et organisé des razzias au détriment des peuples du sud, appelé Dar El Abid ou pays des esclaves.

     Le sud en revanche, moins étendu mais plus peuplé, est en grande partie sédentaire et agricole, animiste et chrétien. Il s’est constitué en son sein une élite formée à l’école occidentale. La colonisation française contribue alors à inverser le rapport de force au profit du sud plus ouvert aux influences étrangères.

     Par ailleurs, la mise en place du  projet, et plus tard, l’exploitation du pétrole a attiré beaucoup de personnes en quête d’emploi. Ainsi, d’abord la  population tchadienne de l’arrière pays quitte leur campement avec 3000 têtes de bœufs pour aller se fixer à Komé le foyer du projet. Ces immigrants y pratiquent l’élevage ou l’agriculture s’ils ne sont pas embauchés dans le projet. Cette arrivée massive des immigrants accentue la pression sur les terres. Dans les villes de nouveaux quartiers se créent. Dans les espaces ruraux, certains immigrants cherchent à créer des exploitations agricoles, mais rencontrent l’opposition des populations autochtones.

     Avec l’accroissement démographique, on défriche de nouveaux champs, on coupe certains arbres. Ce qui contribue à dégrader l’environnement. Les agriculteurs prélèvent le bois (bois de chauffe). Ils font des feux de brousse et brûlent les résidus des récoltes.

     Au Tchad il y a des associations et des ONG qui oeuvrent de manière formelle et informelle à la gestion des conflits entre agriculteurs et éleveurs. Leur rôle complète et appuie celui des autorités traditionnelles et publiques en charge de la prévention et de la gestion pacifique des conflits