La Mamé

poème de Yolande Vercasson "le papé" arrangé par Odette

pour les besoins de l'émission sur  M6

"La France a un incroyable talent"

Elle se tenait au bout de la table
Et nous impressionnait par sa lenteur.
On la voyait si vieille, toute ridée, misérable,
Que l’amour peu à peu fit place à la rancœur.

Elle gênait notre vie, elle gênait nos projets, la Mamé !

A quelques temps de là, prétextant les vacances,
Je l’emmenais là-haut, au flanc du Luberon
« Tu seras bien Mamé. Tu verras la Durance
Du haut de la terrasse de la grande maison.

Ces maisons-là, sont faites pour les vieux.
Regarde, ils ont l’air bien heureux ! »
« Comme tu veux, petite. »
Je la laissais toute seule.

L’air était encore chaud, pourtant je frissonnais,
Et le chant des oiseaux voletant dans le lierre
Disait dans mes oreilles : « Qu’as-tu fait de Mamé ? »

Chaque brin d’herbe, de thym, de lavande, de romarin,
Semblaient me dire : « Mais qu’as-tu fais de Mamé ? »
Même le chant des sources dans ma tête
Criait : « Mais qu’as-tu fais de Mamé ? »

Lentement, le remords me prenait.
Au fil de mes souvenirs, mon cœur s’est apaisé.
Alors, j’ai repris le chemin qui mène à la grande maison,
Retrouver la Mamé, lui demander pardon.

J’ai pris tout simplement ses mains, sans rien lui dire,
Une larme brillait au milieu d’un sourire.
Une Mamé c’est précieux, c’est tant de souvenirs !

Si vous en avez une, jusqu’au bout de ses jours,
Gardez-la près de vous. Et quand elle devra mourir,
Vous lui fermerez les yeux dans un geste d’amour.

Si Aujourd’hui, le chant des cigales
Me pose la question tant de fois redoutée,
Je peux, le cœur joyeux, en digne Provençale
Répondre fièrement : « elle est là, la Mamé ».