J'ai hésité à vous écrire ces quelques lignes car vous allez être choquées en tant que femmes. Comme j'ai pour habitude de dire tout crû, ce que je pense en bien comme en mal,  je me lance pour vous raconter un mariage à l'est du Tchad, chez les Goranes.

    Dès 16 heures les femmes voilées assises à ras du sol sur des nattes, attendent l'arrivée des mariés. Les hommes sont installés dans des fauteuils en plastique,  en demi-cercle, face aux femmes pour marquer sans ambiguïté leur supériorité. Le jeune mari arrive en premier porté par ses amis qui le déposent dans un des deux  larges fauteuils réservés aux mariés. Il brandit un fouet en peau d'hippopotame. Ces fouets sont interdits au Tchad, non seulement parce que les hippopotames deviennent rares mais parce que leurs lanières rugueuses blessent cruellement les chairs. La jeune mariée arrive après le marié,  toute tremblante. Elle prend place près de son mari  dans l'autre fauteuil. Alors les femmes commencent à danser, puis les hommes pendant que les futurs mariés s'observent sans se parler. A la porte des policiers montent la garde. Ils ont des bâtons pour repousser avec brutalité les enfants et les adolescents qui tentent de se joindre à la cérémonie.

   La dot a été calculée en têtes de bétail. La future mariée ne découvre le visage de son époux que le jour du mariage. Après la fatia  (dot) le fiancé et son entourage enlèveront la jeune fille et l'empêcheront  de s'évader jusqu'au moment du mariage. Ce fait est socialement accepté... Après la cérémonie du mariage la mariée est conduite dans la maison du mari. Elle doit rester voilée. C'est le moment du fouet, Tous les proches du marié sont alors autorisés à entrer dans la chambre et à lui donner deux ou trois coups de fouet, donnés souvent violemment pour prouver leur supériorité. Elle devra rester enfermée pendant une semaine dans la chambre et sera fouettée tout ce temps.

   Comme partout dans l'est du Tchad les femmes vivent dans la terreur des hommes dès leur plus jeune âge. Toutes ont été excisées sans anesthésie entre six et huit ans. Elles sont mariées de force dès 13 ans, qui est l'âge minimum requis par la loi. Elles épousent des vieux et deviendront l'esclave des co-épouses. Très souvent la jeune fille refuse d'aller chez son mari.. En cas de refus, elle sera l'objet de moqueries des vieilles femmes et se fera fouetter par son père, par ses frères, par ses oncles et cousins. C'est le déshonneur pour la famille qui devra rembourser la dot si elle ne rejoint pas le domicile de  son mari. Elle est battue, ligotée et doit supporter des violences. Le mari lui attend le moment où elle ne pourra plus opposer de résistance, elle sera attachée sur le dos d'un dromadaire et il arrive qu'en route la pauvre succombe des suites de ses blessures ou de déshydratation.

   Il se fait tard, demain je vous raconterais leurs thérapies de choc pour retourner à leur profit l'humiliation de la répudiation en organisant la "Fête de la Répudiation".  J’en suis encore toute éberluée, ces femmes m’épatent.