Véritable handicap social, la timidité touche beaucoup de personnes et les rend totalement désemparées et démunies dans leur vie sociale, leur rendant la vie impossible et désagréable. Peut-être connaissez-vous quelqu’un qui souffre de timidité ? Peut-être même êtes-vous personnellement concerné par ce problème. La timidité touche plus de personnes que l’on ne pourrait l’imaginer.
Inapte, selon-lui, à retenir l’attention, ou peu sûr de lui, le timide tend à parler trop vite (de peur qu’on ne l’écoute pas jusqu’au bout), voire à bégayer (la nervosité allant crescendo, il en perd vite tous ses moyens) ou, tout simplement, à couper court à la discussion pour aller se mettre « à l’abri ». Effacé, en retrait, frustré de ne pouvoir se faire entendre et mal à l’aise en société, le timide aimerait trouver en lui le courage de s’exprimer sereinement et de prendre part aux discussions, et ses craintes lui empoisonnent l’existence.
Le cercle vicieux de la timiditéLe timide, pour qui la moindre situation un tant soit peu inconfortable est un supplice, va être tenté d’éviter au maximum toute situation qui puisse se montrer potentiellement « risquée » pour lui.
« Sortir en boîte avec des connaissances ? Oh non, je n’ai pas envie, merci. Et puis je ne les connais pas assez bien »veut dire en réalité :
« Non, je n’ose pas, je n’ai pas l’habitude de sortir en boite, j’ai peur d’être ridicule ».La zone de confortLa notion de zone de confort prend tout son sens : le timide se bâtit un univers très bien délimité, qu’il connait, qu’il maîtrise et dans lequel il maîtrise son image. Et il évite autant que faire se peut d’affronter toute situation nouvelle, l’inconnu et l’imprévisible étant, par définition, en dehors de cette zone de confort : il ne s’y sentirait pas en sécurité. Le problème est qu’une zone de confort est en réalité faite d’habitudes, de situations initialement inconnues, et désormais devenues familières. Le timide s’interdisant toute prise de risque, toute situation inconnue, il s’interdit d’augmenter sa zone de confort.
En d’autres termes, plus on se montre timide et timoré, moins on pratique les relations sociales, et moins on est à l’aise : plus le timide se montre timide, plus la timidité prend de place dans sa vie… et plus il est timide.
Personnalité évitanteOn parle de personnalité évitante pour désigner une personne qui décline et renonce à toute prise de risque, de peur de ne pas « assurer ». C’est un trait de caractère reconnu en psychologie, et qui dans bien des cas contribue à l’aliénation et à l’isolement social du timide, souvent lourds de conséquences.
Les racines de la timiditéLa peur du rejetLe manque d’aise du timide dans les situations peu familières (présence d’inconnus, nouvel emploi, fille attirante…) traduit une peur du rejet très marquée « on va se moquer de moi ». Le silence vient donc se poser en alternative la plus simple (je me tais, on ne pourra donc rien me reprocher).
Mais derrière cette peur du rejet, réside autre chose, une cause plus profonde.
Le sentiment d’inadéquation « Je ne suis pas aussi cool qu’eux / je vais passer pour un ringard / un mec bizarre / je ne vais pas intéresser les autres / je ne connais pas leurs codes ».Le timide, bien souvent, nourrit l’impression qu’il ne rentre pas dans le moule, qu’il lui manque quelque chose par rapport aux autres : il se sent décalé, différent, se voit bizarre et inadapté.
Un manque d’indulgence envers soi-mêmeCe sentiment d’inadaptation est bien souvent subjectif. Et quand bien-même le timide serait « maladroit » dans ses relations aux autres, est-ce vraiment grave ?
Personne n’est parfait : nous sommes tous, à des degrés et des moments différents, maladroits dans nos relations sociales. Nous avons tous déjà fait un « bide ». Nous avons tous déjà expérimenté de grands moments de solitude. Soyons francs : personne n’aime ça. Mais avouons également que … personne n’en meurt (même si parfois, ça serait plus facile).
La différence entre les timides et les autres réside ici, précisément :- La plupart des gens parviennent à encaisser la honte passagère : confrontés à une situation gênante, ils se sentent mal à l’aise, certes, mais parviennent à surmonter cette gêne. Certains choisissent d’en rire, d’autres passent tout simplement à la suite. D’autres enfin, un peu moins malins, insistent lourdement pour essayer de se rattraper aux branches et s’enterrent. Bref, nous réagissons tous à notre manière lorsque nous sommes confrontés à une situation sociale inconfortable. Notre égo, notre fierté en prend un coup, mais nous accusons le coup et continuons: «personne n’est parfait, j’ai le droit de ne pas l’être, à chacun son tour d’être ridicule».
- Le timide, lui, est durement touché par chacun de ces moments de solitude. Chaque situation qui le met en «dé-valeur» lui porte un coup sévère à l’égo : son désir d’intégration et de performance sociale (qui passe selon lui par une «perfection sociale» : «je dois être cool et ne pas me montrer ridicule sinon on se foutra de moi, ce qui voudra dire que je suis un inadapté, que je ne vaux rien… »).
Le timide manque singulièrement de l’indulgence dont font preuve les « non-timides » envers eux-mêmes. Il attache trop d’importance à la façon dont il est perçu (alors que jamais personne n’a une idée parfaitement objective et réaliste de la façon dont il est perçu). En fait, ce désir de perfection, cette intolérance envers soi-même, ce désir d’être vu et de se montrer parfait confine au narcissisme. On pourrait ainsi avancer que
la timidité résulte d’un narcissisme combiné à une faible confiance en soi.La surcompensationCertains timides réagissent à l’inverse : au lieu de s’isoler, de se cacher et d’éviter toute situation potentiellement embarrassante, ils se mettent à en faire des tonnes et des tonnes : ils parlent trop fort, se font remarquer, réagissent excessivement (éclatent de rire à tout bout de champ, gesticulent beaucoup) …
Leur malaise demeure le même, mais ils le cachent sous la fierté d’être « remarqués » qui flatte leur égo et leur narcissisme latent. Leurs interactions sociales se font plus nombreuses, mais également plus superficielles : pas question de s’ouvrir, de laisser entrevoir qui on est vraiment. On est cordial, poli, chahuteur, mais ça cache beaucoup de choses qu’on ne montre pas. L’ancien timide devient alors une personne plutôt superficielle et difficile à supporter.
Peu à peu, ils se familiarisent avec le regard des autres jusqu’à ne plus y accorder d’importance, et tombent dans l’excès inverse de la timidité : « rien à foutre de ce qu’on pense de moi ».
Est-ce mieux pour autant ? Clairement pas, même si la personne concerne peut se sentir plus à l’aise (ce qui, après l’isolement et le mal être permanent peut être une bénédiction), cela reste une façon de se couper de toute interaction sociale riche et profonde : au lieu de se protéger en s’isolant, le timide qui surcompense se protège en portant un masque enjoué, un déguisement de boute-en-train.
Et là, plutôt qu’une guérison, il s’agit en fait d’une fuite « par le haut », ce dont le timide ne se rend généralement pas compte.
Le timide et InternetInternet offre du répit aux timides : sur internet, plus facile de maîtriser son image. Facile d’adopter la personnalité qu’on n’ose pas développer dans la vraie vie. On peut retravailler ses phrases, laisser s’exprimer sa virtuosité verbale au clavier, s’exprimer ou se rétracter aisément sans risque de se voir mis en déroute.
On trouve énormément de timides sur les forums … à ceci près qu’au contraire de la vraie vie, ils savent se montrer très sûrs d’eux, voire, condescendants et agressifs sur le net.
Cette échappatoire constitue une solution de facilité temporaire pour le timide qui, au final, sorti du contexte, ne saura toujours pas comment s’exprimer en public. Allant jusqu’à créer un fossé entre sa personnalité profonde et celle visible.
Internet n’est donc bien souvent qu’un palliatif, qui ne résout en rien le problème de la timidité.
Comment gérer sa timiditéSi la surcompensation par l’extraversion et Internet placent une distance entre les timides et les autres ils ne constituent en aucun cas une solution réelle sur le long terme.
Il est important que le timide comprenne
- que sa crainte vient du fait qu’il accorde trop d’importance à la façon dont il est perçu
- qu’il a le droit de ne pas être parfait
- que les gens savent généralement se montrer assez tolérants- bien plus qu’on ne le pense
- qu’on se fout de l’avis des moqueurs, qui bien souvent sont eux-mêmes de grands timides qui se cachent derrière leurs railleries
- que c’est seulement en affrontant les situations inconfortables qu’on s’y habitue, et qu’elles deviennent plus confortables : il faut accepter d’être mal à l’aise au début pour finir à l’aise. Rester à l’abri ne fait avancer personne.
- Que le monde a énormément à offrir à ceux qui osent aller le chercher, et que la tentation de rester seul, à l’abri avec soi-même, dissimulé au jugement des autres qu’on craint, est une mort à petit feu, car la vie passe par les échanges et les interactions sociales.
Dans certains cas, une thérapie peut s’avérer être une aide précieuse pour guérir sa timidité et bâtir une personnalité plus sûre d’elle : si l’introspection et le travail sur soi est nécessaire pour vaincre sa timidité, il peut cependant être très difficile pour certaines personnes de surmonter seules les croyances limitantes et les troubles du caractère à l’origine de leur timidité, tant il est facile de tomber dans l’excès (introversion ou, au contraire, extraversion).