Hier soir, il est sorti, sans mot dire.
Il est rentré, sans mot dire.
Il s'est couché, sans mot dire.

Logiquement, quand je me suis couchée, j'avais pas franchement envie de faire le moindre geste vers lui. Il n'a pas voulu discuter, il a préféré fuir la conversation et est parti en proférant des menaces... ça incite pas trop à faire le premier pas.

Ce matin, il est parti au boulot, sans me prévenir.

Ce midi, il n'a pas téléphoné.

Il y a quelques temps, je l'aurais sûrement harcelé de textos agressifs pointant sa manière d'agir. Mais aujourd'hui, je prévois les arguments qu'il me sortirait, il me dirait sans doute qu'avec mon attitude irrespectueuse de la veille, il ne voyait pas l'intérêt de m'informer. Et que le fait de ne pas l'avoir réveillé hier soir est la raison de son absence de communication du jour.
Oui, une fois de plus, j'ai sans nul doute tous les torts.

Il va rentrer, sans rien dire, et je n'aurai sûrement rien de plus à lui dire non plus. Et dans quelques jours, fatiguée de la situation et d'être seule, je ferai un scandale pour avoir une discussion et des réponses qui auront pour conclusion qu'il aura fait des efforts et pas moi, que j'avais plus de responsabilités dans cette tension que lui et je me sentirai mal.

L'avantage, c'est que ça au moins, je peux le prévoir.

Qui plus est donc qu'aujourd'hui, j'avais sa mère à la maison. Il fallait bien faire bonne figure. Mais ces efforts-là, il n'est pas là pour les voir. Les discussions que j'ai avec elle, les sujets abordés, ma manière de poser des questions pour m'intéresser à sa vie, il ne les voit pas ces efforts-là. Les imagine-t-il au moins ? As-t-il la moindre idée de ce que c'est que de tenter de se contenir et de garder le sourire face à une personne qui passe son temps à vous comparer à l'autre belle-fille, celle-là qui s'est tellement bien débrouillée depuis qu'elle est arrivée dans ce pays dont elle ne parlait pas la langue, celle-là qui a rapidement trouvé du travail en poussant les portes dans le domaine du tourisme, celle-là qui sait s'habiller bien et pas cher, celle-là qui est toujours chic, celle-là qui mène de front vie de famille, travail, études ? Il me répondrait sûrement que sa mère ne compare pas mais essaye de me donner des pistes pour m'aider... C'est vrai, de toute façon il est visiblement évident que je ne suis pas bilingue, que je suis encore au chômage, que je ne m'habille pas comme une femme parce que tout simplement je ne me sens pas encore femme, j'aime m'habiller un peu original et les tenues de petite femme d'affaire sont très loin de refléter mon état d'esprit. Pourquoi est-ce que je me sens tellement une merde après ces réflexions-là ? Pourquoi est-ce que je me sens tellement incapable à côté de celles qui ont réussi ? J'ai tellement peur et j'ai tellement peu confiance en moi qu'aller à un entretien provoque en moi des crises de stress impressionnantes. Je sais qu'il y a un moment où il faut prendre sur soi, mais entendre ces choses-là ne m'aide pas, ça me terrorrise encore plus.

Sinon, depuis hier, j'ai fait que grignotter... RDV demain pour la pesée