Bonjour Les Aminautes,

C'est avec un coeur très lourd que je viens vous donner de mes nouvelles. Elles ne sont guère bonnes, car ma vie a basculé en un rien de temps.

Je suis désolée pour mon silence: d'abord, j'étais très occupée, car on préparait le baptême de ma fille - non, je n'ai pas eu de nouveau bébé entre-temps, tout simplement, on n'a pas fait baptiser notre fille quand elle était petite, car on voulait lui laisser le choix de sa foi. Hélas, quand tout a été préparé et on s'apprêtait à vivre un moment joyeux, inoubliable, assister à une belle cérémonie et nous retrouver autour d'un bon repas, un malheur a frappé dans ma famille.

Ma maman va très mal et je me sens responsable. Elle devait se rendre chez nous pour assister au baptême et passer un mois avec nous comme tous les ans en été. Mais elle n'est jamais arrivée à bon port. En fait, elle était déjà en route, dans un bus d'Eurolines pour venir en France (de Prague), quand l'impensable, l'invraisemblable s'était produit. Sans problème de santé (à part une légère ostéoporose), le coeur de maman s'est brusquement arrêté pendant le trajet. Elle a été maintenue en vie par des voyageurs du bus qui ont fait ce qu'ils ont pu (massage cardiaque, bouche à bouche) en attendant les secours professionnels. Tout cela en pleine nuit (à 3h20) sur une aire de repos aux alentours de Nuremberg. Les secouristes allemands ont dû utiliser un défibrilateur deux fois et ont réussi à faire redémarrer le coeur 40 minutes après l'arrêt. Le coeur bat maintenant comme une montre suisse, mais son cerveau a souffert d'un manque d'oxygène et son avenir reste incertain. Elle n'est pas encore sortie du coma, elle a un oedème au cerveau et son corps a petit à petit retrouvé ses fonctions de base: elle respire toute seule, réagit à la douleur, cligne des yeux, les ouvre de temps en temps, mais son regard reste vide et pour le moment, on ne sait pas comment tout ceci va évoluer. Les neurologues sont très pessimistes et pensent que maman ne se réveillera plus. L'accident s'est produit le 11 juin 2011 au petit matin, elle devait arriver à Strasbourg à 6h15, et au lieu de l'accueillir, j'ai reçu un appel sur mon portable à 4h du matin venant d'une voyageuse qui m'annonçait que maman a été évacuée vers un hôpital de Nuremberg. Elle était en fait en soins intensifs dans une clinique à Neuendettelsau (à env. 30 km de Nuremberg). Je l'ai vue lundi de Pentecôte, après notre baptême, on a fait le voyage en voiture mon mari et moi, un aller-retour dans la journée sans nos enfants, elle a ouvert les yeux trois fois quand je lui ai parlé, mais les a refermés aussitôt. C'était horriblement triste de rentrer à la maison juste avec ses valises, sans elle....Puis, j'ai passé trois jours auprès d'elle (vendredi, samedi et dimanche, j'ai dormi dans un hôtel) pour lui parler, la stimuler au maximum et aussi pour organiser son rapatriement. Elle a été transférée lundi par un avion spécial médicalisé (c'était son premier vol) et à 14h, elle est arrivée à l'hôpital de son domicile. Mon frère et ma tante l'y attendaient déjà. Tout cela est surréaliste, cauchemardesque, je suis épuisée, j'ai des hauts et des bas, des vagues d'espoir et des crises de pleurs, mais je dois tenir le coup. Je m'accroche à une moindre lueur d'espoir, je ne vois pas maman partir. Pas encore. Mais je suis bien consciente qu'elle ne voudrait sûrement pas vivre ainsi, branchée sur des machines et dépendante des autres.

Voilà pourquoi, j'évite de la compagnie, même virtuelle. Mais je ne vous oublie pas, je pense à vous et je reviedrai un jour lorsque j'aurai retrouvé ma paix intérieure.