Comprendre cette évolution, c'est prendre en compte plusieurs facteurs qui régissent l'acte alimentaire des enfants : ressources financières, éducation alimentaire familiale, importance accordée à l'aspect santé/nutrition, mais aussi l'aspect symbolique, les valeurs et les représentations. Cet essai de compréhension des comportements relève d'un aspect plus sociologique de l'alimentation.

Nos préférences alimentaires changent au cours de la vie, vous l'avez sans doute constaté. On peut très bien aimer un plat à 15 ans, et ne plus en pouvoir voir la couleur à 30 ans ou plus.
Au sein d'une même famille, cela peut poser problème (notamment pour la confection et la préparation des repas) : il est difficile de satisfaire chaque membre de la famille, les plats proposés par les parents n'étant pas toujours au goût des enfants.
=> Tout est question ici d'identité générationnelle, on observe une confrontation des générations, les « jeunes » étant plus souvent attirés par l'alimentation rapide, d'où l'augmentation de la « street food » (manger dans la rue). Cette pratique se fait dans un contexte social précis : l'adolescent partage souvent ses repas avec le groupe auquel il s'identifie.

Exemple de fast food - street food : le Kebab...
Photo : www.gamekult.com

Ces habitudes de consommation chez les jeunes sont souvent qualifiées d'alimentation destructurée, et s'opposent « aux normes » du repas français (ces normes s'articulent autour de l'acte de manger assis à table, durant un certain temps (20-30 minutes min), avec un repas standard (assiette/couverts)).

3 phases clés dans le processus d'apprentissage
du « savoir culinaire » et sa mise en pratique :

1 - Période d'observation (héritage culinaire)
2– Action (self apprentissage et mise en application de l'expérience)
3– Création (liberté et essais)

1 - Période d'observation (héritage culinaire)
L'héritage culinaire familial est important dans le processus du savoir faire culinaire car c'est ce qui va déterminer ensuite l'importance que l'on va accorder à la cuisine et à l'alimentation. C'est généralement la mère de famille qui cuisine le plus, pour l'enfant et l'adolescent c'est LA référence en la matière, celle qui va déterminer la culture culinaire familiale et qui orientera l'enfant/adolescent vers telle ou telle branche du « savoir faire culinaire ».

2– Action (mise en application de l'expérience et "self apprentissage")
L'étape qui suit la phase d'observation est le passage à l'action. L'adolescent ou le jeune homme (ou jeune femme) applique ce qu'il a observé durant son enfance. Il « imite » dans un premier temps les les recettes, les plats, les habitudes, les gestes culinaires relatifs à l'environnement familial dans lequel il a grandi, puis, généralement, il va petit à petit suivre les recettes des livres de cuisine, la référence n'étant donc plus la mère, mais autrui.

3– Création (liberté et essais)
En fin d'adolescence, on cherche une identité sociale particulière, on cherche à appartenir simplement à un groupe. Par cette pratique, l'adolescent s'éloigne légèrement des normes familiales qui lui ont été inculquées, sans pour autant les renier.
Ce phénomène est souvent vécu par l'adolescent comme moment de liberté. Cette phase de liberté s'exprime aussi par le développement de l'expression de la créativité.

L'adolescent veut innover en cuisine pour se démarquer des traditions culinaires familiales. Mais son budget étant limité, sa faible connaissance et maîtrise des techniques culinaires (malgré l'apprentissage des gestes culinaires familiaux) font que sa cuisine se limite bien souvent à la préparation de desserts (gâteaux au chocolat, ...) ou de plats classiques (spaghettis carbonara, pâtes au beurre, etc...).

Le premier critère de choix d'un adolescent (pour son repas) est le goût, il faut que le plat soit bon, savoureux, copieux. Ainsi, il oriente plus facilement son achat vers des plats fast food, des plats à base de féculents, ... alors que les études ont bien montré qu'il connaissait les principes de base d'une alimentation équilibrée.
Leur réponse est que bien souvent « ils ne veulent pas se prendre la tête » pour choisir leur repas.
Personnellement, je pense que ce phénomène toujours davantage les adolescents que les adolescentes, car vers 14-15 ans les filles font plus volontairement attention à leur ligne.

Comment gérer ces situations ?

Acquérir une identité, appartenir à un groupe sont des caractéristiques spécifiques à l'adolescence qui permettent de développer les relations sociales de l'adolescent. Il ne faut donc pas empêcher son enfant/adolescent de participer à des repas entre amis, que ce soit au fast food ou ailleurs.

=>  L'idée est de NE PAS INTERDIR la fréquentation de ces lieux de restauration rapide, mais de faire comprendre à l'enfant qu'il vaut mieux limiter la fréquence de visite de ces lieux, d'autant plus que ce type d'endroit n'est pas ce qu'il y a de meilleur pour le portefeuille, on a souvent un mauvais rapport qualité/prix.

=> Les autres repas sont bien souvent pris à la maison, il est donc important, lorsqu'on fait ses courses alimentaires, de remplir son caddie essentiellement en fonction des recommandations nutritionnelles (avec quelques "extras" plaisir) pour pouvoir composer des repas variés, colorés, équilibrés, sans omettre l'aspect "plaisir" !

Assiette de falafels maison, légumes et amaranth cuit façon risotto : c'est tout de même plus appétissant non ?

Cathy SCHMITT©